L'origine des cannelés de Bordeaux

L'origine des cannelés de Bordeaux



Toute l'histoire des cannelés -canelés- de Bordeaux


Dans le bordelais, le vin n’est pas le seul à avoir franchi les frontières bordelaises : le cannelé c’est toute une histoire. Une histoire de croquant et de moelleux à la fois qui fait le succès des pâtisseries de la région, mais pas que. C’est aussi une histoire de longue date.


Selon une légende créée au XXe siècle, c’est dans un couvent de sœurs religieuses, qui aidaient les pauvres, qu’on aurait vu apparaître à la fin du XVIIe siècle le cannelé. 
Les archives, les fouilles n’ont jamais montré la présence de moules nécessaires à la fabrication des cannelés ni de traces dans leur comptabilité de l’achat de produits nécessaires à la fabrication. 
Cette légende a sans doute été fabriquée au XXe siècle pour ancrer dans la ville une pâtisserie emblématique, en racontant une histoire qui est celle de ces religieuses du couvent des Annonciades de Bordeaux, qui allaient sur les quais du fleuve où elles récupéraient le blé tombé des cales des bateaux ou de sacs éventrés et les jaunes d’œufs voués à être jetés qui étaient laissés du collage des vins*, afin de confectionner un gâteau nommé le “canelat”. Le cannelé descendrait donc du Canelat, une sorte de gâteau à base de farine et de jaunes d’œufs, fabriqué par les sœurs, dans le XVIIe siècle au profit des plus pauvres.
A travers cette légende, on encre le produit autour de l’identité bordelaise, la vigne et le port.


Si dans un premier temps ces pâtisseries rustiques sont destinées aux plus modestes, il a fallu attendre le XXe siècle pour qu’elles deviennent plus élaborées. Un artisan, sans doute un petit peu plus ingénieux que les autres, a la bonne idée d’ajouter à la recette du rhum et de la vanille, du lait. La recette originale s’enrichit de ces produits issus des colonies antillaises car en effet, Bordeaux était une plaque tournante du commerce triangulaire et accueillait des bateaux aux cales remplies de produits exotiques dont les familles bourgeoises pouvaient bénéficier.



Avec la fermeture du couvent, le canelat sembla être tombé dans l’oubli et la recette améliorée fort semblable contenant du rhum, de la vanille et du sucre fut transmise dans les familles traditionnelles bordelaises. Cette pâtisserie est donc nommée le cannelé, de par son origine supposée (le canelat) et de par la forme dorique** de son moule en hommage aux colonnes du Grand théâtre de la ville de Bordeaux.



Le cannelé commence à être reconnu à Bordeaux au début du XXe siècle mais il passe de mode après la Seconde Guerre mondiale. Il faudra attendre finalement entre 1970 et 1980 pour qu’il y ait véritablement une production significative du cannelé mais surtout une reconnaissance au-delà de Bordeaux. Il revient alors en force dans les années 80, notamment car Jacques Chaban-Delmas, alors maire de Bordeaux, le choisit pour emblème.  


Devenu une institution dans le bordelais, le cannelé est défendu à partir de 1985 par une confrérie spécialement dédiée qui tente de le faire rayonner dans toute sa région : la confrérie du Canelé de Bordeaux.


 En 1985, 88 pâtissiers se réunissent pour créer la confrérie du canelé bordelais et établir le cahier des charges de ce tout nouveau symbole à la recette précieusement gardée. Ils ont pour but de promouvoir l’authenticité du petit gâteau bordelais et de le faire reconnaître partisan du patrimoine culinaire régional.
Le véritable canelé bordelais doit alors être conçu à partir des ingrédients de la recette originale -et rien d’autre- ; être cuit dans un moule en cuivre nappé de cire d’abeille ; présenter une coquille brune, croustillante et un cœur tendre ; et enfin s’écrire avec un seul « n ». Celui qui en mettra deux, comme préconisé pourtant par l’Académie française, ou déroge à l’une de ses conditions, ne pourra prétendre fabriquer un véritable canelé de bordeaux mais une copie.


Personnellement j’ai fait le choix d’écrire cannelé avec deux n. 
La 1ere raison? J'aime particulièrement respecter l’orthographe de l’académie française.
La deuxième? Etant donné que je confectionne mes cannelés en dehors de la région bordelaise je ne me vois pas emprunter cette orthographe tant protégée par la confrérie. Malgré que ma recette respecte scrupuleusement leurs exigences.



*Le collage des vins consiste pour le vigneron à clarifier son vin afin de le clarifier et de l’affiner. Il rend le vin plus limpide et de meilleure qualité organoleptique. Pour ce faire, il utilise une protéine (à l’époque principalement du blanc d’oeuf) qui, en coagulant, fait descendre au fond de la cuve -ou du fût- par gravité les particules en suspension. Voici pourquoi à l’époque les vignerons se débarrassaient des jaunes d’oeuf dont ils n’avaient pas l’utilité.
 


**la forme dorique est une forme qui remonte à l’antiquité grecque et constituait notamment les temples. Voyez-vous à quoi ressemblaient les colonnes de ces temples? De longs tronçons qui forment les colonnes, creusées de cannelures larges.